Maravillas - New York : Fajitas et Cantaoké ! - Les bonnes tables (ou pas) de Jack et Walter

6 mars 2014

Maravillas - New York : Fajitas et Cantaoké !

Ce n’est pas vraiment une table que l’on vous conseillera si c’est votre premier séjour à New-York, ni même si c’est votre deuxième, Williamsburg et Brooklyn sont moins abrupts… Mais si vous avez envie de continuer à découvrir les mille visages de cette ville, alors allez faire un tour dans le Queens, pas de bobos ici, pas plus de hipsters, peut-être demain quand les prix seront devenus à leur tour inaccessibles du côté de chez Radegast et des Mast Brothers… Quand vous aurez déjà découvert le MOMA, il faudra venir ici découvrir le PS1, affilié au musée d’art moderne depuis l’an 2000, là aussi c’est moins consensuel que le so chic MOMA…
Nous y sommes allés au départ pour goûter les cuisines de l’Amérique du Sud servies dans les foodtrucks stationnés les uns à côté des autres. Mais il faisait si froid ce soir-là, c’était quelques jours avant les tempêtes de neige qui ont paralysé New York en ce début d’année, que les foodtrucks étaient moins nombreux, le vent glacial avait chassé les clients et nous nous sommes réfugiés chez Maravillas qui peut vouloir dire aussi bien merveilles que choses étonnantes en espagnol…

Nous avons poussé la porte sans vraiment savoir que c’était un karaoké mexicain réputé ! Un Cantaoké, comme cantar, chanter… La première serveuse ne parlait pas anglais, avec la seconde nous nous sommes compris, moitié espagnol, moitié anglais, pas de touristes, pas d’Américains ou presque, et que des Mexicains ou presque. La bière est vite arrivée, avec quelques tacos, vraisemblablement maison, pas de verre, on ne va pas chipoter. Le poulet à la mexicaine nous a un peu arraché le palais, mais nous avions voulu faire les fiers pour impressionner la serveuse qui nous mettait en garde, le feu ne s’éteint pas à la bière mais à la purée de haricots rouges, les fajitas pliées dans un petit papier blanc se remplissent généreusement de porc, de bœuf et de crevettes grillés sur la fonte brûlante, c’est simple, bon, une cuisine familiale en fait.

Famille, voilà le mot juste pour décrire l’endroit, tout le monde se connaît ici, d’ailleurs quand nous sommes entrés, le silence s’est fait pendant de longues minutes, on nous a dévisagé, on a d’autant plus intrigués quand on a dit qu’on venait de Paris et qu’on parlait très mal espagnol et puis on a applaudi les premiers chanteurs, on n’a pas tout compris mais ça parlait d’amour, de solitude, de famille et d’amis abandonnés tout en bas, de l’autre côté de la frontière, il y avait aussi des larmes, dans les paroles et sur les joues fatiguées de cette femme qui serrait violemment le micro sans fil, comme pour ne pas tomber, la vie est rude disaient des paroles. Et puis il y eut de nouvelles chansons auxquelles nous n’avons pas compris grand-chose mais cela avait l’air bien plus joyeux et plus coquin, ça parlait peut-être de la lune, du vent qui couche le maïs et des baisers volés.

Quand ça devient trop triste, il y a Nancy qui veille ! Nous l’avions d’abord prise pour la femme du patron, tant elle a des airs de patronne ! Grave erreur. Nancy, c’est la Reine du quartier, sa photo est sur les affiches scotchées sur la vitrine. Nancy a un joli chapeau, un petit short très court, un soleil tatoué sur la cuisse gauche, un soleil pour réchauffer les cœurs froids en décembre à New York alors qu’à Mexico il fait si chaud… Nancy, elle sèche les larmes, passe le micro et monte le son. A ce sujet n’espérez pas pouvoir échanger, vous ne vous entendrez pas, la sono est à fond, les chanteurs et chanteuses s’époumonent, il n’y a bien que nous pour lire les paroles sur l’écran de télévision, ici tout le monde connait les paroles qui donnent une claque au mal du Pays. Elle est comme ça Nancy, elle réchauffe les cœurs sous le regard de la Sainte-Vierge entourés de guirlandes de Noël et de lumières clignotantes…