Keisuke Matsushima - Nice : On a juste flirté...
Si vous voulez dîner chez Keisuke Matsushima à Nice vous ne devrez pas avoir de retard avec votre avion (ou votre voiture, ou votre train). Une alerte au colis piégé à Paris avait fait ce soir-là évacuer le terminal et l’avion avait pris du retard. Nous avons prévenu et la réponse très courtoise a été sans appel : « Très bien, mais pas après 21 heures ». Bref on dine tôt au Pays du Soleil Levant, il faut le savoir.
Essoufflés mais à l’heure, nous avons découvert la cuisine de ce Chef étoilé depuis dix ans déjà. Une jolie salle, une clientèle apparemment internationale et un service très « British » dans l’esprit et l’humour. Ne manquez pas l’étonnant meuble à fromages…
Les grincheux diront encore un Chef japonais qui mixe la gastronomie française et le kaiseki, laissons parler les grincheux. Le Chef s’est formé très tôt à la cuisine française à l’école Tsuji de Tokyo et son implantation à Nice ne doit rien au hasard, la région est riche de beaux produits comme en témoigne le joli marché de Nice.
Est-ce là que le Chef avait trouvé des brocoletti et l’envie de les associer à des ravioles de gambas ? Peut-être, toujours est-il que cette entrée est bien plus complexe qu’il n’y parait au premier abord, la raviole est riche, le sésame et le curry se parlent en s’écoutant, on est à la limite de se perdre sans jamais se perdre, c’est un plat construit dans l’équilibre. Une autre entrée avec un supplément de vingt euros, effet caviar oblige, aurait finalement méritée d’être plus simple, sans caviar et donc sans supplément. La gelée de bouillabaisse revue avec malice par le Chef japonais n’a pas besoin de l’artifice de ce caviar vénitien un peu plat et sans beaucoup de relief. A moins que ce ne soit justement cette simple gelée, à la belle couleur ambrée, forte en goûts qui ne prenne le dessus, écrasant la petite quenelle de caviar. Le Vieux Port a pris le dessus sur la Lagune. Le tartare de daurade et la gelée de bouillabaisse auraient fait à eux seuls une très belle entrée.
Le bar qu’on appelle loup en Méditerranée est rôti à la perfection, la chair blanche est restée ferme, les artichauts barigoules du marché sont réduits en purée et l’émulsion est vivifiée au citron du pays, c’est très très bon mais… vraiment pas généreux, d’autant que ce n’est pas un menu dégustation en cinq ou sept services mais bien un entrée-plat-dessert. On a failli demandé du rab, avant de se raviser, pas vraiment l’ambiance cantine ici. Alors on s’est vengé sur cet excellent Coteaux d’Aix, moitié sauvignon, moitié sémillon, un vin à la robe comme un soleil, un vin rond et élégant élevé sans engrais chimique et autres cochonneries !
Les desserts sont graphiques et pointillistes, avec une mention particulière pour le travail autour du fenouil. Pas d’effet waouh cependant, à moins que ne soit le service un peu empressé (parfait pour les déjeuners d’affaires du midi), une heure et onze minutes montre en mains, qui ne nous a pas laissé le temps de les apprécier pleinement...
Disons que ce dîner est comme un premier rendez-vous, on a juste flirté, assez pour dire MIAM mais trop furtivement pour aller plus loin…
Nous avons choisi le menu "Pâques" (entrée-plat-dessert) à 48 € :
- Brocoletti "Devisement du monde" en sabayon, ravioles de gambas au sésame, émulsion de crustacé au curry
- Caviar d'esturgeon blanc, tartare de poisson, gelée de bouillabaisse à la Japonaise, gingembre, wasabi, ciboulette
- Loup rôti, purée d'artichauts barigoules, son émulsion au citron du pays
- Citron du Pays "Mimosa" en tartelette renversée, meringue au fenouil, grenades, sorbet fenouil
- Chocolat noir "Sapaudia", pignon des pins, meringue chocolat, granité de campari, sorbet orange sanguina
Le pain Coteaux d'Aix Château de Beaupré 2014 L'addition (2) : 160 €
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22 ter rue de France, 06000 Nice - Téléphone : 04 93 82 26 06
Ouvert du mardi au vendredi de 12:00 à 14:00 et du lundi au samedi de 19:30 à 22:00