Pierre Gagnaire - Paris 8 : Un impressionniste rue Balzac…
Il n’est sans doute pas nécessaire de présenter le Chef Pierre Gagnaire. Quand il entre dans cette salle de l’Hôtel Balzac, le restaurant parisien originel, la salle est parcourue d’un léger frisson. Les convives se poussent du coude et chuchotent à voix basse « Il est là ». Il a ce visage d’éternel adolescent un peu trop grand, la mèche rebelle, un regard plein de bienveillance. Il prend du temps avec les uns et les autres, fait des selfies avec des Américains venus à Paris que pour lui, salue discrètement un couple d’amoureux trop occupés, et s’attardent avec des retraités stéphanois, « On vous suit depuis le début Chef » dit la dame en rosissant. Combien dans cette salle savent qu’en effet tout a commencé dans la ville de la « Manu », rue Richelandière, les trois étoiles bien entendu mais aussi la faillite et le départ pour Paris, rue Balzac. C’est ici que le Chef s’est reconstruit pour nous offrir le meilleur et être reconnu de Paris à Bordeaux, de Tokyo à Hong-Kong, de Londres à Las Vegas. Nelson Mandela aimait à dire « Je ne perds jamais, soit je gagne, soit j’apprends » ; Pierre Gagnaire a beaucoup appris et gagné, à commencer par notre plus grand respect. Quand il est passé à notre table, nous étions intimidés, nous nous sommes levés pour lui serrer la main, on a dû dire « bonjour Monsieur Gagnaire », pas « bonjour Chef » , un peu comme on dit « Monsieur Paul » ou « Monsieur Senderens » dans les cuisines desquels il apprît. Nous sommes repartis avec notre menu dédicacé comme deux fans de douze ans, qu’il est bon de s’émerveiller encore !
Ce dîner, évidemment à réserver pour de grandes occasions, et nous en avions une très grande, est une plongée dans l’univers du Chef. Dès les mises en bouche on est emportés par la poésie, comme un inventaire à la Prévert : une marguerite de carotte, un maki de pomme de terre au yuzu, un bonbon de noisette à la soubressade dans une feuille comestible, des croûtes de pain à la fleur de sel avec une émulsion d’huile d’olive aux fruits de la passion et au citron, des sablés au parmesan et des sacristains au paprika, une bille de pois cassés, persil et beurre d’anchois, des crevettes grises dans un petit bol avec des nèfles du Japon, des radis, et une crème de céleri rave au sésame noir, sur une languette une tartelette de couteaux, tourteau et aneth, et au fond du dés à coudre un mascarpone d’olives noires, raifort et groseille. On a envie de dire « encore » au serveur parfait qui raconte de belle manière les histoires inventées par Monsieur Gagnaire et il nous en racontera beaucoup, car ce grand menu est pour les grands curieux, trois heures d’émerveillement.
Pierre Gagnaire nous est apparu comme le Vincent Van Gogh de la gastronomie, un mot qu’il n’aime pas, s’inspirant des impressionnistes et des pointillistes. L’esthétique de l’assiette est une loi mais ne croyez pas qu’il en oublie l’essentiel « … Je m’attache depuis plusieurs années à produire des mets qui soient bien assaisonnés, bien cuits. J’essaie d’éviter les fausses bonnes idées ! ». Voilà l’essentiel est dit, en toute simplicité.
Pierre Gagnaire nous offre des émotions, comme celle de se retrouver dans la petite chambre de Vincent Van Gogh à Auvers-sur- Oise. Ce n’est jamais une assiette mais plutôt une œuvre, on y sent l’émotion et l’affection, on oublie la rigueur, le travail, la recherche de la perfection. Il se sort, et nous sort, du carcan de la représentation réaliste pour nous donner à contempler le très très bon, des impressions d’instantané de réalité joyeuse et réjouissante. Une grande assiette, des plus petites périphériques, le plat se construit par petites touches, il faut prendre du recul pour entrer dans le tableau mais que c’est bon, d’abord bon ! TRIPLE MIAM si cela a encore un sens avec Monsieur Gagnaire…
Avant de commencer...
Nous avons choisi le menu Esprit Pierre Gagnaire - Printemps |1| (310 €) :
- Blanc de Saint-Pierre et lobe de foie gras pochés dans un consommé de fenouil aux fleurs de badiane du Vietnam, glace d’ortie ; algues du Croisic, mousseline de chou-fleur, cristes marines ; eau de concombre au plancton
- Crème prise d’asperge verte à l’estragon, les pointes enrobées de graines de moutarde au champagne, mousse de roquette. Asperge blanche rôtie parmesan | citron, laitue farcie de tourteau, mousse de lait Ribot. Barquette de macvin, suc d’orange, céleris branches ; morilles fraîches au Savagnin.
- Filet de sole de petit bateau, amandes coquillages et praires aux câpres ; navet daïkon au vinaigre de riz, beurre Kientzheim
- Raviole de morue, thon rouge, seiche et aubergine ; fèves | petits pois | oignons cébettes | txistorra.
- Salpicon de homard bleu, miroir de vin de Graves ; fondue de rhubarbe, lard de Bigorre croustillant. Une bisque, quenelle de haddock, pousses de printemps.
- Suprême de poularde Culoiseau farci Edouard Nignon – sauce Pitchi : quinoa rouge, gnocchi d’épinard, côte de blette, carottes fanes. Galette de ricotta aux olives vertes Lucques, tomates datterino.
- Le grand dessert
Pour conclure...
Marsannay Charlopin & Tissier 2014
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Pierre Gagnaire
6 rue Balzac, 75008 Paris - Téléphone : 01 58 36 12 50
Métro : Georges V - www.pierre-gagnaire.com
Ouvert du lundi au vendredi de 12:00 à 13:30 de 19:30 à 21:30